Pays d'Arles en Transition

Résilence et transition énergétique

« Don’t look up », peinture de l’absurde en taille réelle

C’est un film amusant mais surtout intéressant que Don’t look up. Au-delà de la comédie satirique parfois un peu vulgaire (juste à la mesure de notre monde), il met en lumière le malaise de notre civilisation, celui qui se révèle quand nous nous confrontons à l’absurde sans pouvoir y réagir ou changer le cours des choses (attention, spoiler par la suite). L’absurde, c’est ce que vivent deux scientifiques (le professeur Mindy et la jeune scientifique Dibiasky) qui découvrent qu’une comète va heurter la terre mais s’aperçoivent aussitôt que, de la présidente (véritable Trump au féminin jouée par Meryl Streep) aux médias, leur découverte ne fait que s’ajouter à un cirque médiatique dont seules l’audience et l’outrance guident les priorités.

Car non seulement leur bouleversante découverte, qui devrait accaparer l’attention, est reléguée à l’état de fait divers, mais sa présentation même doit respecter le format des médias, faussement convivial et accessible. Invités à un talkshow, ils ne disposent finalement que de quelques minutes pour présenter leur découverte, alors que l’émission fait la part belle à l’histoire de cœur grand-guignolesque entre Ariana Grande et son compagnon rappeur.

Comme l’écrivait Bourdieu, on peut dire ici que le fait divers, omniprésent dans les médias, est celui qui fait diversion des vrais problèmes. La priorisation des enjeux n’existe plus, donc la pensée disparaît dans un maelstrom confus de news qui disparaissent aussi vite qu’elles apparaissent. La présentatrice du talkshow l’incarne parfaitement : blasée, vide et sans attache réelle, elle passe d’un sujet à l’autre, d’une relation à l’autre, dans un relativisme poussé au point que les évènements n’ont plus pour elle aucune singularité, ni aucune importance. À l’instar de cette présentatrice, l’un des grands intérêts du film est que les personnages, pensés comme des caricatures, touchent très juste à de multiples moments.

Deux stratégies se mettent alors en place : Mindy (Di Caprio) accepte de jouer le jeu des médias et de dédramatiser, quitte à se compromettre, tandis que la jeune Dibiasky explose en plein direct pour crier sa colère face à l’apathie régnante. Son cri du cœur fait temporairement monter l’audimat mais la sanction ne tarde pas à tomber : pour avoir bousculé les codes des médias sans y avoir été invitée au préalable, elle devient persona non grata. Elle ne sera plus réinvitée. Alors qu’elle est à l’origine de la découverte de la comète, les honneurs iront finalement au professeur Mindy, dont l’image plus lisse est plus rassurante pour le grand public et pour les décideurs. D’autant que ce dernier semble prêt à toutes les compromissions, jusqu’à s’engager dans une liaison avec la présentatrice du show. Comble de l’humiliation pour la jeune Dibiasky, son cri de colère sincère et légitime devient un mème : elle est tournée en dérision, perçue comme folle, par une foule ignare qui englobe jusqu’à sa famille et ses proches.

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